Le Bastringue Littéraire
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descriptionTonino l'imposteur... EmptyTonino l'imposteur...

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"... À l'heure où j'en termine avec mes années scolaires, je vous dois un aveu.
J'ai été déloyal envers vous, mes seuls alliés, qui avez respecté mon indépendance
d'esprit et les chemins de traverse qu'elle empruntait. J'aimais lire dans votre regard
la circonspection en me rendant ma copie, selon vous hors sujet, mais toujours vue
comme un joyeux dérivatif à la monotonie des corrections. Certains commentaient
mon style sibyllin et filandreux. L'un de vous ne m'a-t-il pas demandé discrètement
si je suivais une psychothérapie ? Avec quelle ironie je passais à vos yeux pour un
insatiable lecteur ; je feignais l'enthousiasme quand vous me prêtiez un livre, que
je promettais de vous rendre au plus vite, ce qui était le cas, et pour cause : jamais
il n'avait quitté mon sac... Je vous ai grugés, vous à qui je dois tant, et j'en ai honte.
M.Traube, Mme Foux, Mme Bruisset, Mme Maréchal, Mme Delorme. Aucun de vous
n'était de ces profs charismatiques comme on en voit au cinéma, qui vous initient 
aux guerres shakespeariennes sur un terrain de foot et qui trouvent Lamartine tout
simplement "chiant". Mais pour la plupart vous aviez lancé en 68 un pavé sur votre
académie, et vous vous fichiez bien des consignes du rectorat tant que vous parve-
niez à faire se gondoler toute une classe à l'arrivée du grand Mamamouchi dans 
Le Bourgeois Gentilhomme. Si vous aviez su le peu d'efforts que je fournissais, 
alors vous auriez cessé d'être mes seuls alliés. Mais qu'y puis-je si je n'ai pas pleuré 
à la mort de Porthos, si je me suis perdu dans les couloirs de la pension Vauquer, 
si L'Étranger m'est resté si longtemps étranger ?
   Lire c'est entrer dans une cathédrale. Écrire c'est y mettre le feu. Lire c'est un patri-
arche qui vous veut du bien. Écrire c'est une petite traînée qui n'en fait qu'à sa tête.
Lire c'est l'excellence des autres. Écrire c'est l'insuffisance de soi."


Tonino Benacquista "Porca miseria" Gallimard

descriptionTonino l'imposteur... EmptyRe: Tonino l'imposteur...

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Salut JL, les dernières phrases, j'adore, merci d'avoir ramené Tonino. Je l'avais découvert avec "carrés rouges sur fond noir" ou un truc du genre et la "maldonne des sleepings"
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