L'enfant lit l'almanach...

De Francis Jammes :



L'enfant lit l'almanach près de son panier d'oeufs.
Et, en dehors des Saints et du temps qu'il fera,
Elle peut contempler les beaux signes des cieux.
Chèvre, Taureau, Bélier, Poissons, et cætera.

Ainsi peut-elle croire, petite paysanne,
Qu'au-dessus d'elle, dans les constellations,
Il y a des marchés pareils, avec des ânes,
des taureaux, des béliers, des chèvres, des poissons.

C'est le marché du ciel sans doute qu'elle lit.
Et quand la page tourne au signe des Balances,
Elle se dit qu'au Ciel comme à l'épicerie
On pèse le café, le sel et les consciences.

Dernière édition par Jihelka le Sam 12 Aoû - 17:58, édité 1 fois

Je ne comprends rien à ce sonnet. Vous pouvez l'expliquer ?

Pour l'explication de "Voyelles", c'est Dédé qu'on sonne.

Dernière édition par Jihelka le Lun 22 Mai - 15:13, édité 1 fois

Je trouve le i pas du tout rouge, mais alors pas du tout. Je l'ai toujours trouvé jaune. Quand au reste... à peine.

Pourquoi elles auraient pas des couleurs, les consonnes ?
Parce qu'il y a trop de consonnes et pas assez de couleurs ?
Et pourquoi le Voyant il inventerait pas des couleurs :
blouge! C'est bien, blouge. Et noirron, c'est pas mal non plus.
Et viaune, blorange...

Non mais n'importe quoi !
Alors voici, c'est très simple en substance : c'est ce que lui évoquent ces lettres à travers les couleurs en lesquelles il les voient par synesthésie.
Maintenant, cette pièce a fait couler beaucoup d'encre ; pour le détail, on peut (re)lire par exemple l'analyse d'Etiemble.

Dernière édition par DédéModé le Lun 22 Mai - 18:57, édité 1 fois

Parlez pour vous, CanZoniere ! Personnellement je ne m'en lasse pas : je trouve ça grandiose !
Et pourquoi pas les consonnes ? Parce que c'est la sonorité qui appelle la couleur !

"Quand on arrêtera de prendre "Voyelles" au sérieux, on pourra parler de Rimbaud sérieusement."

Vois ! I•els, gens de lettres, se pressent pour en donner l'explication.

Je viens de relire DÉLIRES II - Alchimie du verbe :

« J'inventai(*) la couleur des voyelles! (...) Je réglai la forme et le mouvement de chaque consonne, et, avec des rythmes instinctifs, je me flattai d'inventer un verbe poétique accessible, un jour ou l'autre, à tous les sens.
(...)
La vieillerie poétique avait une bonne part dans mon alchimie du verbe. »

(*) Rimbaud dit bien j'inventai ; voilà qui condamne la plupart des gloses sur le sonnet des Voyelles 
(note d'Étiemble)

... et qui vous donne en partie raison, CanZoniere, à mon grand dam !
Mais en partie seulement, car s'il n'y a pas synesthésie au sens de la science, elle est poétiquement remarquablement présente, et cette seule présence poétique vaut, à mon avis, qu'on porte intérêt au sonnet.

J'ai regardé un peu cette histoire de synesthésie, on ne parle guère que de Rimb' et Baud' mais j'ai trouvé cette jolie phrase :
Je croyais entendre la clarté de la lune chanter dans les bois. (Chateaubriand)

Il l'entendait pas bramer, le clair de lune. (à Maubeuge ?)

il roulait même les "r" !