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Dernier éveil

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03012023
Dernier éveil

Dernier éveil, par Frédéric de Jesus Marques
@fredericdejesusmarques
Troisième place sur le podium
     
J’ouvre les yeux. Mes frères et sœurs dorment encore, accolés, à côté, innocemment. Le bouillonnement de nos peaux en sueur. Le toit de fortune. Les bâches en décomposition traversées par un soleil incandescent. L’odeur est forte et intrusive. Le parfum musqué de nos corps imbriqués se mêle aux relents d’hydrocarbure. Je m’enivre une dernière fois de mon enfance. Maman m’a dit qu’il possède un vrai lit. Quatre pieds massifs, un sommier robuste, un matelas épais et des draps en coton. Demain, dans le lit du vieil inconnu, j’ouvrirai les yeux pour de faux.

Commentaires

Ninn' A
Étrange... dans le lit du vieil inconnu lui-même ou dans un lit chez le vieil inconnu ?
Mis à part le "accolés, à côté", j'aime beaucoup.
DédéModé
Il était possible en les liant de donner un verbe aux phrases 3, 4 et 5.
« accolés, à côté » contredit « imbriqués ».
Une « odeur forte » n'est-elle pas toujours « intrusive » ?
« Maman » aurait dû entamer un second paragraphe, annonciateur d'un changement d'état radical : le passage de l'enfance à l'âge adulte, de la liberté à la servilité en même temps que de la misère au confort, voire de la vie à la mort.
C'est d'ailleurs là que résident la force et la qualité du texte : quelques mots y suffisent pour tracer et faire ressentir au lecteur ce destin tragique.


Dernière édition par DédéModé le Mer 4 Jan - 19:30, édité 2 fois
Thierry Lazert
Je ne sais pas si, en tant que dépositaire et "anonymisateur" des textes du concours, j'ai le droit de commenter, mais après tout, pourquoi pas ? alors je le prends, ce droit (je ne connais pas l'auteur-e).

Ce texte m'a l'air bien à part, et si terriblement, horriblement autobiographique qu'y chercher "du" littéraire, je m'en empêche, même si je le trouve malgré moi aussi bien inscrit que ce que permet l'ininscriptible imprescriptible.

Ninn' A et Elvira aiment ce message

Salima Salam
Le texte débute et termine sur ouvrir les yeux. Entre les deux : la description de la misère sociale et économique, de l'univers familial, de l'absence d'espérances et d'avenir, de la tentation soufflée par la mère et à laquelle l'enfant cède.
Belle opposition des champs lexicaux entre le monde de l'enfance et celui d'après (bâches en décomposition versus draps en coton, les quatre pieds massifs produisent une impression de confort incroyable, représentent une élévation par rapport à la couche sur le sol, élévation de couche sociale, un territoire marqué pour qui a dormi comme les animaux dans le gîte). 
La perspective de l'enfant est très juste, jusque dans la chute.
Un texte très dense sur la vie et la mort, qui saisit l'essence de la réalité et la rend en phrases dont la portée dépasse les 100 mots.

DédéModé aime ce message

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Le mot “innocemment” est (pour moi) la clé de voûte du texte. Comme le démontre Salima, il va y avoir une élévation mais cette élévation à un prix, celui de l’innocence (terme qui soulève ici de multiples interprétations). Du coup, le texte dérange et c’est très bien. Il met le doigt sur une réalité bien concrète, celle du devenir des enfants dans la misère (et ceux qui en profitent ? "le lit du vieil inconnu", comme le dit Ninn'a, est plus que troublant).

Ce que je trouve très fort : Le contraste entre le premier “j’ouvre les yeux” et celui de la dernière phrase, “J’ouvrirai les yeux pour de faux”. Le “pour de faux” est terrible. Habituellement les enfants jouent à faire semblant de dormir où d’être mort en fermant leurs yeux. 
ici, “je” fera semblant de se réveiller et de vivre en ouvrant les siens. Faire semblant de vivre, n’est-ce pas une peine atroce?

Ce que j’aime le moins : je trouve la description olfactive des corps un peu trop lourde (“sueur”, “odeur forte”, “parfum musqué”) pour ce petit texte de 100 mots. De plus, elle me semble décalée avec la chute du texte.

Salima Salam et DédéModé aiment ce message



Dernière édition par Virginie le Mer 4 Jan - 8:34, édité 1 fois
DédéModé
Rappel du Règlement :
3.3. L'anonymat est garanti par la neutralité du Dépositaire qui transmet les textes anonymisés au Jury et ne contribue d'aucune autre manière au Concours.


Je rappelle en outre à tous que ledit n'a pas d'autre objet que de mettre en avant la qualité littéraire de textes qui sont des fictions et non des témoignages sur lesquels vous seriez appelés à vous épancher.


Maistre Thierry, officiez, je vous prie...
AU SUIVANT !




Jeanne, vos commentaires sont un peu légers ; si vous pouviez dorénavant développer un tant soit peu vos pensées...
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