NOUVELLE : Des mots pour Elle...

— Mayday, mayday, mayday !

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— Ici, le pilote de chasse Jean-Léonard Greenwich à tour de contrôle, vous me recevez ? 

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— J'ai été touché par un missile à tête chercheuse, je répète, je suis touché, à vous !

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— Équipe au sol, mon moteur fume, je perds de l’altitude, à vous !

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— Je passe en pilotage manuel, demande d'assistance immédiate, à vous !

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— Initialement, je devais prendre part à une mission d’exfiltration mais j'ai été pris pour cible par l'ennemi, à vous !

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— L'aéronef Alpha, Fox-trot, Tango, Papa, Charly, Roméo, Zébra 468 (AFTPCRZ 468) est en détresse, à vous !

— ...

— Le fuselage de mon appareil a été criblé de balles, j'ai le feu au derrière, à vous !

— ...

— Les voyants lumineux sont tous au rouge, je vais m'écraser au milieu de nulle part, à vous !

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— Voici mes coordonnées : 12°45' de latitude Nord, 45°4' de longitude Est, à vous !

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— Le cockpit est fissuré, le gouvernail est foutu, tout le système est HS, à vous !

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— Et merde ! Je vais atterrir en catastrophe ! À vous !

— ...

— Mayday, mayday, MAYDAY ! À vous !

— ...

— Répondez-moi, s'il vous plaît, à vous...

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Cette fois-ci, je ne vais pas m'en sortir miraculeusement comme les autres fois. Pour moi, la messe est dite. Ce soir, je ne rentrerai pas à la base. Il y aura un bombardier de moins sur le tarmac. Je vais m'agripper à mon siège autant que je peux, je vais rester à mon poste jusqu'au bout. Mon bel aéronef, mon grand rapace furtif des airs, ma ceinture de sécurité me rattache solidement à toi. On va finir le job en beauté. Si j'actionne mon siège éjectable, je vais être capturé, torturé, interrogé jour et nuit. Ils vont m’infliger les pires atrocités possibles ces barbares. Je préfère rester aux commandes de mon bolide. La guerre, c'est bel et bien fini pour moi. Je ne reverrai plus mes frères d'armes de la division aéroportée. À titre posthume, l'on me donnera la plus grande distinction que peut recevoir un soldat mort sur le champ de bataille. Mes officiers supérieurs me décerneront la médaille étoilée pour services rendus à la nation. Les drapeaux seront en berne dans toute la caserne. Les coups de canon résonneront derrière mon cercueil qui sera drapé des couleurs de ma chère patrie. Ma famille, ma chère famille, sera fière de moi qui aurai  perdu la vie en combattant pour la liberté. Heureusement qu'il y a cette boite noire qui enregistre tout ce que je dis, je pourrais laisser un petit mot pour Elle. Après le crash, dans les débris au sol, on pourra grâce à ces enregistrements lui transmettre mes dernières paroles. Elle pourra m'entendre et me réentendre lui dire au revoir.

REC● : « Chérie, c'est moi Jean, ton homme. Je vis mes dernières secondes. Le temps est venu de te dire que je t'aime. Je ne te l’ai jamais dit avant, c’est parce que je n’ai jamais su comment on dit ces choses-là. Peut-être est-ce à cause de mon enfance difficile ? Ou à mes années de service militaire ? L’on m’a appris à réprimer ce que je ressens au fond de moi. Je tiens tellement à toi, si seulement tu pouvais t’imaginer à quel point. Je m'en vais loin, et pourtant pas trop loin de toi, puisque je serai toujours quelque part dans ton cœur. Il te suffira de penser très fort à moi et je serai là. J'aurais bien aimé rentrer à la maison pour te serrer encore une fois dans mes bras, mais je crains que cela ne puisse se faire. Ne me pleure pas trop, sinon tu auras de vilaines cernes et tes si beaux yeux deviendront ternes. Moi, je n'ai jamais eu peur de la mort, je suis un soldat. Mais toi… Chaque fois que je partais en mission, tu avais peur que ce soit la dernière. Tu l’as tant redouté... Maintenant, c’est une réalité, je m’absente pour toujours. Mon appareil a pris feu.

Dans quelques instants, mon aéronef touchera le sol pour ne plus jamais en décoller. Ces mots je parachute à tes oreilles pour que tu ne dises pas après que j’étais trop égoïste. Je suis en face de la mort, et j’aimerais tant déserter les rangs pour aller te rejoindre. Je serais prêt à affronter la Cour Martiale pour être avec toi une dernière fois. Au moins, j’ai cette vielle photo de toi sans couleur sur mon tableau de bord. Alors tu es avec moi jusqu’à la fin. Grâce à toi, je n'ai pas de regret à cet instant précis. Je suis reconnaissant envers la vie pour tout ce qu’elle m’a donné. J'ai eu plus de vie qu'un chat. Dis à notre bébé que je suis vraiment désolé. J'aurais voulu être là pour sa naissance et pour le voir grandir. Ça aurait été formidable de l'éduquer ensemble. Mais avec toi, je le laisse entre de bonnes mains. Tu lui diras qui était son père, que tout là-haut dans le ciel, j'ai vécu les plus belles aventures de ma vie. Dis-lui qu'à chaque fois qu'il lèvera les yeux, il pourra m'apercevoir en train de planer. Dis-lui que le soleil est si beau vu d'ici, que j'ai volé trop proche de lui et je me suis fait brûler mes ailes en acier. J'espère que cet enregistrement vous aidera à faire votre deuil. 

À tous mes frères d’armes, mes compagnons de dortoir, notre camaraderie me manquera. Je veux des putains d’effusions de larmes à mon enterrement, je compte sur vous les amis. Bon les tafioles, je me mets au garde-à-vous. Je vous salue, fin d'enregistrement. »

À vous, tour de contrôle !

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