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Sur la route de Ouargla

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03102023
Sur la route de Ouargla

—    Ah, saloperie de putain de vent, et ce sable, ce sable ! Putain, ce sable dans la gueule, ça fait mal ! J’y vois que dalle ! La bagnole ! Je vois pas la bagnole ! Ah, là ! La portière ! Putain de vent, j’arrive pas à ouvrir la portière ! Rémi !
 
Elle parvient finalement à ouvrir la portière et monte dans la Land Rover.
 
—    Ça va ?
—    Oui. C’est dingue, ça s’arrête d’un seul coup, juste le temps d’ouvrir la portière… c’est dingue. 
—    Ben ouais. Bon. Tu vois Ouargla à combien ?
—    Je dirais deux heures, deux heures et demie. Comment tu veux savoir ? Tempête de sable : plus de panneaux ; plus de panneaux : la carte, et on est où, sur cette carte ? Hein ? Qu’est-ce que j’en sais, moi, par rapport à Ouargla ?
—    Oh, allez, Rita -
—    Rémi, arrête de m’appeler Rita, ça m’énerve.
—    Babe ?
—    Arrête !
—    Oh, ben quoi ? C’est mignon, babe, non ?
—    Allez, démarre, s’il te plaît, et appelle-moi Léa, juste Léa. S’il te plaît.
—    C’est en train de se calmer, on dirait, non ?
—    Mmm.
—    Des panneaux.
—    Oui, je vois.
—    Ouargla, Ouargla... 260 km. Hébé !
—    Bon, ben, ça fait nous fait Ghardaïa à 70 bornes, j’ai pas trop envie de pousser plus loin pour aujourd’hui. Ça t’irait ?
—    Ah, oui, tout à fait.
—    Rémi ?
—    Mmm ?
—    J’ai une image qui vient de me revenir, là, juste là, quand j’ai prononcé « Ghardaïa ».
—    Quel genre d’image ?
—    Genre bonheur total, insurpassable. J’ai tout le corps qui me fait bizarre, tellement c’est beau.
—    Tu veux pas me la décrire un peu, ton image ?
—    Oui, je te raconte.
 
La Land Rover de Rémi et Léa est un chameau, elle est faite pour le désert.

               //
 
Le mot « chameau » vient de réveiller un souvenir endormi.
 
Je suis un enfant de sept ans et on me fait monter sur la selle d’un chameau, ou peut-être d’un dromadaire, je ne sais plus. L’animal se lève et se met à marcher, conduit par un homme qui marche à côté. 
 
Le contact avec la selle me rend heureux. C’est elle qui me relie au chameau, avec tout ce qu’il a d’animal, d’étranger, de fort, d’invincible. Je suis heureux de sentir chaque pas de la bête me soulever. Mes mains tiennent une espèce de poignée qui est une prolongation verticale de la selle, en forme de T, devant moi. Cette poignée est faite de corde et de cuir et elle aussi, par sa solidité, me rend invincible. Le poil du chameau a la couleur même du désert où nous sommes. Couleur sable, couleur terre, terre ultra-séchée par le soleil inépuisable. Pendant quelques instants, je ne fais qu’un avec la bête : je suis un homme du désert et je suis comblé.
L’odeur.
L’odeur me revient, difficile à décrire pour un enfant. Ça sent le sauvage. Ça sent le ciel très bleu. Ça sent la vie, infinie.

                 //
 
La Land Rover est un chameau, elle est faite pour le désert. Rémi la ménage : leur survie pourrait facilement dépendre d’elle. Il garde un œil sur le compte-tours et reste à l’écoute du moteur. Sans se laisser trop divertir, Rémi anticipe l’histoire de Léa. Souvenir d’enfance, c’est sûr.
 
—    On avait roulé toute la journée et on avait atteint, le soir, avant la nuit, une oasis. Mes parents avaient trouvé un hôtel dont j’ai tout oublié, sauf le jardin. De la verdure de partout. Partout. On ne pouvait pas poser les yeux sur autre chose que de la végétation. Enfin, j’en viens à la fameuse image. Un cube de ciment d’environ deux ou trois mètres de côté rempli d’eau fraîche. Les parois du cube devaient faire vingt ou trente centimètres d’épaisseur et des marches en ciment, sur le côté du cube, permettaient d’accéder à l’eau. Et me baigner dans cette petite piscine a été un bonheur… je ne sais pas comment dire… rare ? Mon corps revit la fraîcheur de l’eau, je revois la mousse verte qui recouvre en partie le ciment, et je revois les amies de mes parents qui se baignent avec moi. Il n’y a pas beaucoup de place dans le cube, juste assez pour trois ou quatre personnes à la fois…
—    Il t’en faut peu pour être heureuse : un cube de ciment, de l’eau dedans, et le tour est joué !
—    Cette abondance d’eau et de verdure, en plein milieu du désert, c’est ça qui est fabuleux. Je me baignais dans une eau magique, Rémi, magique. Je sais bien que les images de l’enfance sont magnifiées mais celle-ci agit de façon anormale sur mon corps : je suis dans la piscine, dans une voiture sur la route de Ghardaïa, je me baigne et je suis heureuse.
 
Rémi se tourne vers Léa et voit des larmes de joie couler sur ses joues. Peu après, une crise de sanglots commence à la secouer. Il attend la fin de la crise.
 
—    Ton oasis, c’était Ghardaïa ?
 
—    Ben non, justement, et c’est ce qui m’étonne parce que le flash a commencé quand j’ai dit « Ghardaïa ». Mais j’en suis sûre, c’était ailleurs.

La Land Rover dépasse trois chameaux qui progressent lentement, menés par deux hommes en blanc.

Commentaires

Salima Salam
J'aime beaucoup vos dialogues, surtout le monologue introductif. Par contre, je ne vois pas du tout où la fin doit mener le lecteur. Je repasse si je trouve quelque chose à dire.

Thierry Lazert aime ce message

Thierry Lazert
Pour moi, la fin de l’épisode est contaminée par le souvenir du narrateur (auteur ?) : le chameau. Une façon de boucler une boucle. Mais votre remarque me dit que ce n’est pas évident du tout donc j’ai raté mon coup !

Salima Salam aime ce message

Ninn' A
Pas tout compris non plus. Dans mon souvenir tu avais écris un autre texte sur Ghardaïa.

Thierry Lazert aime ce message

Thierry Lazert
Je crois me rappeler d’un texte où il est question de Ghardaïa, oui.
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