Doublure
par @Lou Gasparini
Enfant, je revenais les mains et les poches pleines de mes cueillettes forestières : branches, pierres, plumes, feuilles, poils, écorces, pommes-de-pins et autres fruits de sous-bois. Sale et souvent écorchée, je passais par ma cabane déposer mes merveilles avant de filer me débarbouiller. Alors, propre et confortablement emmitouflée dans mon pyjama, je rejoignais le salon et mon grand-père pour l’une de nos soirées rituelles où j’ai appris presque tout ce que je sais aujourd’hui.
- Qu’est-ce que tu fais, Papi ? je demandais à chaque fois.
- Je cache des trésors dans mes doublures, me répondait-il toujours.
C’était comme un code entre nous, ce dialogue en deux répliques, cette répétition sur laquelle on peut compter et qui voulait tout dire.
C’était vrai, d’ailleurs ; il cousait dans ses doublures de vestes, de manteaux, de pantalons, de gilets, des trésors emballés dans du papier journal et je n’ai jamais su ce qu’il cachait. Je savais seulement que c’était important.
Aujourd’hui, en vidant sa maison, en triant ses affaires, j’ai découvert son secret. Dans les papiers journaux de ses doublures, mon grand-père cachait les plumes, les feuilles, les jolis cailloux que je lui ramenais.