PROSE : Humeur dominicale

De mon lit je vois un bon morceau de ciel, tout bleu.

Si je tends bien l’oreille, j’entends le petit cri étrange de Plumette qui demande je ne sais quoi. L’autre, Poulette, ne dit jamais rien. Aucune revendication, c’est à croire que tout lui va. Elle a dix ans de plus que Plumette. Elle a compris que nous ne comprenons rien aux revendications des poules, elle s’est fait une raison. Mais elle ne pond plus depuis longtemps. Ben oui, faut pas non plus la prendre pour un pigeon.

Je reviens au morceau de ciel. C’est quoi ce grand toit bleu qui devient noir tous les jours, pour Poulette et Plumette ? Bleu ou blanc, ou gris. Moi je sais. Je suis un humain du 21e siècle, j’ai le savoir. Ce toit, ce n’est pas un toit, c’est le ciel. C’est ce qui nous est donné à nous, humains, de voir de l’univers depuis cette Terre où nous tenons debout tout seuls grâce à la force gravitationnelle. Un autre truc dont nous, humains du 21e siècle, avons le savoir. Sûr et certain. Il ne me viendrait pas à l’idée de remettre en question la force gravitationnelle. Certains ont remis en question le fait que le Soleil tournait autour de la Terre, quelle idée ! Nous, nous qui écoutons ceux qui savent le mieux parce qu’ils passent leurs journées à étayer leur savoir, nous savons aujourd’hui que nous ignorons 95% de ce qui se passe dans l’univers, cet univers dont je causais quelques lignes plus haut, que je vois bleu le jour, noir la nuit, depuis ici. Pour que ce soit bien clair pour tout le monde, on qualifie ces insondables et inconnus 95%, de matière noire, d’énergie noire, de trous noirs, tout cela étant bien entendu soumis à de graves points d’interrogation, noir sur blanc, risquerai-je.

Avez-vous prêté l’oreille à ce qui se dit, en terre de connaisseurs, sur le cerveau humain ? Eh oui : la même chose qu’au sujet de l’univers. “On” croit comprendre à peu près quelques % de ce qui s’y passe.

Nous voilà donc arrivés à l’ère de l’ignorance assumée par les mieux placés pour ne pas ignorer. Enfin un peu de sagesse ?

À voir. Nous continuons de dénoncer sans complexe tout moyenâgisme. Cet ensemble de croyances farfelues propres aux contemporains d’un âge dit moyen.

Ah les cons !