Je n’ai rien à dire
Vraiment rien à dire
Je n’ai rien à dire
Comment vous le dire ?
Une fois le quatrain terminé, il réfléchit à l’éventualité d’un cinquième vers :
Je n’ai rien à dire
qui, sémantiquement, enfoncerait le clou :
Je n’ai rien à dire
Vraiment rien à dire
Je n’ai rien à dire
Comment vous le dire ?
Je n’ai rien à dire
De plus, le nombre impair de vers lui convenait mieux. Curieusement, ce nombre impair lui paraissait plus équilibré. Il ne restait plus qu’à trouver un titre à l’œuvre. Il hésitait entre Rien à dire et Je n’ai rien à dire.
Il opta pour Je n’ai rien à dire, plus en rondeur que Rien à dire qu’il jugeait trop brut.
Il donna sa pièce à lire autour de lui, amis, famille et autres proches, et ne reçut que des avis positifs : « C’est original », « C’est osé », « C’est percutant », « C’est subversif ».
Cela l’encouragea à continuer dans la poésie. Il ne regrettait pas d’avoir quitté ses études de droit pour devenir artiste. Parce qu’il avait pris l’habitude de prendre des notes en cours, le choix d’écrire s’était imposé très naturellement. Un choix également dicté, un peu, par élimination. Il n’avait jamais joué d’un instrument de musique, jamais chanté, jamais tenu un pinceau, jamais tenu le moindre morceau d’argile entre ses mains ni tenu la moindre gouge à bois entre ses doigts, alors bien sûr, écrire était un choix raisonnable. Sa décision de devenir artiste restait néanmoins un pari osé.
Encouragé par les compliments sur son premier poème, il se lança dans une deuxième œuvre :
Qui suis-je ici ?
Que suis-je, à toi ?
Peut-être rien !
N'existé-je donc
Qu’à moi seul ?
Il sentait qu’il avait atteint un climat d’une densité certaine et s’empressa de faire lire cette deuxième pièce après avoir trouvé le titre qu’il lui fallait : Être
Il ne reçut que des retours élogieux : « Ho ! », « Aaah ! », « Pfiouu ! », « Han ! », « Hon ! ». Fort de ces nouveaux encouragements, il fut convaincu qu’il avait trouvé sa voie : il était poète, rien n’était plus sûr.
Sauf que plus sûr, plus sûr, tu chauffes, Arthur, il le trouva. Eh oui, à son troisième poème, l’entourage décida – NB : sans se donner le mot – d’arrêter la faux-dercherie et réagit unanimement par un douloureux « Mm. ». Le temps du doute était venu, il faudrait peut-être réajuster le tir question carrière artistique. Mais devenir quoi ? Il ne savait rien faire et la poésie en laquelle il avait cru le temps de deux poèmes le lâchait en rase campagne. Très bien, puisque c’était comme ça, on allait voir ce qu’on allait voir. Il pouvait écrire bien autre chose que des poèmes : des nouvelles, des romans, enfin, de la fiction, à plus ou moins grande échelle. C’est là qu’intervient Hortense. Ou plutôt Françoise.
*****
– Fais voir ce que tu nous ponds, là.
– C’est pas fini !
– Je vois bien que c’est pas fini, je veux juste voir si c’est viable.
Françoise, c’est la plus assidue des habitués de La belle Hortense, rue des Hautes-Mercuries dans le IIIème. Françoise, dès qu’elle voit un nouveau, elle lui saute dessus :
– Tu sais pourquoi ça s’appelle La belle Hortense, ici ? C’est parce que le patron s’est inspiré du titre du roman de Jacques Roubaud, La belle Hortense, et c’est moi, moi qui te parle, qui ai inspiré le roman à l’auteur, c’est moi, la Hortense du roman. Donc, ce café littéraire, oui, littéraire, je te prie de mater tous ces bouquins autour de toi, c’est pas un vulgaire rade, c’est La belle Hortense ! Chez moi, quoi.
C’est vrai que c’est un café littéraire, La belle Hortense, avec des livres partout, et c’est ce qui a attiré l’ex-futur poète, avec son béret basque et son imper grège, quand il est passé devant. Il n’écrit plus ailleurs, depuis qu’il s’est mis à écrire. Oh, ce n’est pas qu’il écrive énormément, ça, non, mais le peu qu’il écrit, il l’écrit ici. Et là, Françoise/Hortense qui s’intéresse à son texte, c’est pas banal, elle qui a été la Muse d’un grand écrivain.
– C’est viable ?
– T’en as déjà fait beaucoup, des poèmes ?
– Non, c’est mon troisième.
– Ah. Je comprends. Je… Tu devrais le finir et… le faire lire autour de toi…
– Oui ?
– Oui.
Donc on en est là : le gars a lâché ses études de droit pour devenir artiste, ses poèmes sont désespérants de médiocrité et il va falloir trouver autre chose à écrire s’il veut absolument écrire.
Première tentative : une nouvelle très courte, l’histoire d’un pauvre type qui fait fortune en découvrant par hasard qu’en mélangeant de l’eau froide et de l’eau chaude, on obtient de l’eau tiède. La nouvelle est refusée par tous les éditeurs à qui il l’envoie.
Deuxième tentative : une nouvelle plus longue qui s’attache à démontrer, primo, qu’on peut bâtir son bonheur sur la croyance que deux et deux font cinq, secundo, que les athées ne sont pas spécialement plus heureux que les autres. Là encore, la nouvelle de Maurice ne trouve aucun éditeur.
Françoise entre et pose son cabas à terre et, de sa voix grave, salue à la ronde.
– Dis-donc, patron, tu veux pas nous mettre du jazz ?
– Ah, tu lâcheras donc jamais le morceau ! Je t’ai dit cent fois : dans un café littéraire, pas de musique. Ça gêne les lecteurs et les écrivains. Pas vrai Maurice ?
– Les écrivains, les écrivains… disons ceux qui sont en train d’écrire, hein, parce que moi, écrivain, …
– Oui, bon, de la musique, ça te gênerait, non ? Françoise qui demande du jazz, t’en dis quoi ?
– J’en dis que oui, désolé, Françoise, mais ça me gênerait.
– Françoise, le public a voté, pas de jazz aujourd’hui encore, mais c’était bien tenté.
René, c’est un homme pas très grand ni très épais et plein de distingué en lui. La bonne quarantaine, on lui verrait bien une petite moustache fine, façon Zorro, mais non, il a juste une boucle en argent entre les narines et une bague en or à l’annulaire gauche. Et il porte toujours des chemises élégantes.
Françoise fait la gueule. Ça lui fait les épaules qui tombent sous son manteau rouge, ça lui fait les cheveux noirs tout ternes et on a envie de lui dire que c’est pas grave, pour la revoir briller.
– Je vous avais apporté des gourmandises pour l’apéro, vous aurez rien du tout.
Un client silencieux jusqu’ici se risque à négocier :
– Sur le principe, je suis d’accord avec le jazz, moi.
– Moi aussi, ajoute un deuxième client du fond du café. C’est pas que je tienne absolument aux gourmandises, non, mais un peu de musique pour entretenir l’ambiance…
– Ah, mais regardez-moi un peu cet opportunisme ! Je vote jazz pour un gâteau ! Ah ben bravo ! s’esclaffe Françoise.
Le dernier qui vient de parler, celui du fond, c’est Marcel. Un baba-cool resté planté au milieu des années 70, toujours décoiffé, une barbe d’une longueur variable, entre trois et trente centimètres, selon la météo, la saison, l’humeur, ou va savoir quoi. Ses deux cols roulés ont été tricotés par sa mère en 1974 et ils lui vont toujours. Marcel n’a ni grossi, ni maigri. Et il vote toujours écolo. Sa vue a bien baissé mais il refuse de porter des lunettes, alors il se contente de lire les gros titres et si quelque chose lui semble valoir la peine, il s’arrange pour se faire lire l’article. Évidemment, tout le monde lui répète d’aller se faire faire des lunettes mais il n’y a pas moyen, Marcel ne veut pas. Et personne n’a le cœur à lui refuser la lecture d’un article, alors c’est sans fin.
Maurice :
– C’était quoi ?
Françoise :
– Quoi ?
– Ce qu’on vient d’entendre ? On aurait dit un couple en train de… enfin, en train de… tu vois ?
– Je vois, oui, mais j’ai rien entendu, moi. T’as entendu quelque chose, René ?
– Ben non, rien.
– Vous vous foutez de moi, fait Maurice, c’était flagrant ! Ça a pas duré longtemps mais c’était flagrant ! Me dites pas que vous avez rien entendu !
Maurice à Marcel, au fond :
– Toi non plus, t’as rien entendu ?
– Ben, non. Oh, tu te drogues, Maurice ?
– Diégo ?
– Ben non, rien.
– Ouais, ouais, c’est ça, foutez-vous de moi. Vous avez tous parfaitement entendu et vous voulez me faire devenir chèvre… eh ben, salut la compagnie, moi j’y vais.
Maurice attrape son béret et son imper et disparaît.
– Qu’est-ce que tu lui as servi, à Maurice ? demande Marcel à René.
– Rien d’extraordinaire, un petit rouge.
– Mais c’est qu’il était sérieux, Maurice, rigolait pas, commente Françoise.
– Il a peut-être eu une hallucination ? propose Diégo.
Diégo, c’est celui qui avait reparlé de jazz en premier. La presque trentaine, jeune, donc, mais malgré tout l’un des plus vieux clients de La belle Hortense. Son père le traînait là tous les soirs jusqu’à la fermeture quand il avait sept ans. Il porte des souliers noirs prêts à claquer sur un flamenco, sauf que le flamenco, il s’en fout, Diégo. Un jean étroit, un tee-shirt blanc et un perfecto acheté à New-York quand il pouvait, Diégo se fout autant du jazz que du flamenco, il n’écoute que du punk-rock dans sa piaule à cent mètres de La belle Hortense.
– Une hallucination ? Comme ça ? D’un coup ? s’étonne Françoise.
– J’ai lu dans un article que ça peut arriver à n’importe qui, n’importe où, n’importe quand, réplique Diégo.
– Ah, mais oui, il a raison ! s’exclame Françoise, ça me revient, j’ai lu un article là-dessus, il y a quelques mois, paraît que ça se peut !
– Ça me rappelle une émission que j’ai vue à la télé, fait René, oui, ils disaient ça, je crois bien.
Françoise :
– Tiens, t’as la télé, toi maintenant ? L’autre jour, tu jurais par tous les Saints qu’on verrait jamais la boîte-à-cons dans ton salon !
– C’est une émission que j’ai vue chez une copine, la télé était allumée, j’allais quand même pas l’éteindre, non ?
– Ouais, ouais, elle est bien pratique, ta copine…
– Oh, et puis si j’avais envie de changer d’avis, faudrait que je te demande la permission ?
– Eh, tu fais bien ce que tu veux de ta mauvaise foi, hein !
Marcel intervient :
– Bon, on arrête la guéguerre, là ? Tu veux pas plutôt nous filer tes biscuits, Françoise ?
– C’est pas des biscuits, c’est des chouquettes ! et elle lève son cabas pour en sortir un sachet en papier plein de chouquettes.
René sort trois assiettes.
– Je sais pas vous, mais moi ça me chagrine un chouille, ce qui est arrivé à Maurice…
– T’inquiète, Marcel, il aura vite oublié, rétorque Françoise.
*****
– Dans le métro ?
– Oui.
– Vous pouvez être plus précis ?
– Oh, c’est simple, j’étais assis dans le métro et j’ai commencé à entendre comme un couple qui… un couple qui…
– Qui fait l’amour ?
– Oui. Ça n’a pas duré longtemps, mais assez pour que je sois sûr que c’était ça que j’entendais.
– Et donc, ça, ç’était la deuxième fois ?
– Oui.
– Et là non plus, vous n’aviez pris aucune substance particulière ?
– Non, rien.
– Et il y a eu une troisième fois, vous m’avez dit ?
– Oui.
– Dans quelles circonstances ?
– Chez une amie. On parlait de tout et de rien et j’ai commencé à entendre, toujours pareil, un couple, et j’ai été très gêné parce que je pensais qu’elle entendait, comme moi.
– Et maintenant, qu’est-ce que vous en pensez ?
– Je ne sais pas quoi penser. Elle n’a pas eu l’air gêné, en tout cas.
– Et là encore, ça a duré peu de temps ?
– Oui, je dirais une dizaine, une quinzaine de secondes. Je peux vous dire que c’est long quand vous êtes en compagnie d’une femme et que vous vous demandez si elle entend comme vous un couple qui baise.
– Qui baise ?
– Oui, qui baise.
– Et là, vous pensez à quoi ?
– A mes parents.
– Pourquoi, d’après vous, pensez-vous à vos parents au moment où vous nommez vraiment la chose : un couple qui baise ?
– Je ne sais pas.
– Et que pensez-vous, là, plus précisément ?
– Je suis dans ma chambre et j’entends des drôles de bruits dans la chambre de mes parents. Je me lève et au moment où je veux aller vers leur chambre, je vois le manteau en daim de ma mère accroché au mur qui me dit « stop ».
– Vous me parlez de votre chambre d’enfant ?
– Oui, bien sûr.
– Bien sûr ?
– Ben oui.
– Et pourquoi « Bien sûr » ? Pourquoi est-ce évident que vous me parlez de votre chambre d’enfant ?
– Je ne sais pas, c’est peut-être les bruits de mes parents, je ne comprenais pas.
– Et pourquoi le manteau de votre mère qui est accroché au mur vous dit-il « stop » ?
– Parce qu’il est rouge.
– D’accord. Et après ?
– Après je retourne me coucher et j’entends les bruits qui continuent. Et puis à un moment ça s’arrête et je crois que je m’endors.
– Vous croyez ?
– Je… je crois, oui.
– Bien. On va en rester là.
*****
La fleuriste, une femme entre deux âges, très simple d’apparence, l’a remarqué tout à l’heure mais elle n’y a pas prêté attention plus que ça. Maintenant elle ne peut plus ne pas le voir : il y a un bonhomme qui fait les cent pas à quelques mètres de sa boutique, depuis bien dix minutes. Il fait des allers-retours sans s’arrêter sur le trottoir, devant la banque qui est fermée. Elle n’a rien d’autre à faire que le regarder tant qu’elle n’a pas de client. Elle se demande s’il n’est pas en train de parler tout seul, en tout cas il a l’air de faire des gestes, elle pense qu’il ne va pas très bien mais ne sait pas quoi faire. Finalement elle décide d’aller le voir. Arrivée à sa hauteur, elle lui demande, avec un accent étranger, si tout va bien. Il ôte son béret et passe sa main sur ses cheveux et son front trempés de sueur :
– Je ne peux pas vous répondre, Madame, je suis en direct avec Annecy et Montpellier et personne ne répond, c’est dingue, ça !
La fleuriste, derrière ses lunettes orange, remarque que le gars n’a pas d’oreillette, il y a un couac quelque part.
– Vous voulez entrer dans mon magasin, vous asseoir un peu, boire un verre d’eau ?
– C’est pas de refus, Madame. Merci. Je ne comprends pas, ni Annecy, ni Montpellier…
La fleuriste l’accompagne dans sa boutique, le fait asseoir et lui apporte un verre d’eau.
– Vous voulez peut-être appeler quelqu’un ? Ça fait un moment que je vous vois faire les cent pas, là, devant.
– Les cent pas, oui, je sais, c’est parce que je ne sais rien faire.
Il attrape un bout de la ceinture de son imper et tire dessus nerveusement.
– Mais pourquoi tirez-vous comme ça sur votre ceinture, monsieur ?
– C’est pour la tendre, pour la tendre, la tendr…esse, la tendresse, Madame, la tendresse…
Une larme coule de chaque œil, sur le côté. La fleuriste, embarrassée :
– Vous habitez loin, monsieur ? Vous voulez que je vous appelle un taxi ?
C’est que la dame des fleurs, elle commence à être très embêtée avec le Maurice qui part en sucette…
– Oh, j’ai pas les moyens pour un taxi, madame. Non, je vais rentrer à pied. Vous dites que ça faisait un moment que je faisais les cent pas, devant ?
– Oui, dix bonnes minutes. Et puis quand je suis venue vous voir, vous m’avez parlé d’Annecy et Montpellier, je n’ai pas bien compris.
– Annecy et Montpellier ? Le visage de Maurice s’éclaire, un sourire lui vient aux lèvres.
– Aaah, ça me fait bien plaisir de vous voir sourire, monsieur, ça me fait bien plaisir, vraiment. Vous voulez un autre verre d’eau ? Vous avez eu une grosse émotion, on dirait, restez assis encore un instant, si vous voulez.
– Merci madame, mais il faut que j’y aille.
– Vous êtes sûr que ça va aller ?
– Sûr. Merci. Merci pour tout. Au revoir madame.
Maurice remet son béret et quitte la boutique, direction maison. À peine est-il sorti qu’il revient voir la fleuriste :
– Vous voulez bien me dire où on est, ici ?
– Ici, on est rue du Jura.
– Rue du Jura ? C’est quel arrondissement, ça ?
– Quel arrondissement ? Il n’y a pas d’arrondissement, à Strasbourg, −
– Strasbourg ? On est à Strasbourg ?
– Ben… oui.
– Hahaha ! De mieux en mieux ! Strasbourg !
*****
Françoise/Hortense est assise sur un haut tabouret, côté vitrine. Elle tient son manteau en laine rouge sur ses genoux, René a mis la clim, il fait bon.
– Tiens ! Qui c’est que voilà ? On parlait de lui y a pas un quart d’heure !
– Holà la compagnie ! Comment va tout ce monde ?
– Ho, Diégo ! Toujours vivant ? On parlait de toi tout à l’heure, je demandais à Françoise si elle se souvenait de quand t’étais gamin.
– Ton père, enchaîne Françoise, – quel salaud, entre nous – qui te traînait ici jusqu’à pas d’heure, t’avais pas huit ans !
– Eh ouais, et tu vois, je suis pas mort. Pas encore.
– Par contre, y en a un qui me fait du souci, c’est Maurice. Depuis son coup du couple qui baisait, c’est plus le même.
– Va savoir ce qu’il a eu…
Ça, c’était René, avec un regard plongeant dans le lointain de ses étagères remplies de livres.
– Va savoir, confirme Françoise de sa voix grave, je vais essayer de…
– Non, Martine, laisse-le venir, –
– Eh, j’ai rêvé ou tu m’as appelée Martine ?
– Oui, c’est vrai, excuse-moi –
– Ah, ah, aaah…
– Oui, bon, ça va,…grogne René.
– Mais t’as pas une alliance, toi ? glisse une Françoise insidieuse.
René la regarde du plus haut de son mètre soixante-douze :
– J’ai une alliance et je t’emmerde !
– Hébé, en v’là de l’ambiance !
– Ah ben, Maurice ! Tu tombes très bien, lui annonce Françoise. On s’inquiète pour toi, figure-toi. Faut que tu nous expliques un peu, parce que oui, on s’inquiète.
– Ah mais non, vous n’avez pas à vous inquiéter, je me retrouve avant-hier à Strasbourg sans savoir ni pourquoi ni comment, mais à part ça, tout va bien.
– Strasbourg ?
– Oui. Strasbourg.
– T’es allé à Strasbourg ?
– Je suppose, vu que je m’y suis retrouvé et qu’il a fallu que j’en revienne.
– Hahaha ! explose de rire Diégo, oui, t’as dû y aller !
– Et t’as entendu… des trucs, à Strasbourg ? le questionne René, sourire entendu.
– Non, mais j’ai fait le trottoir, répond Maurice avec un grand sourire.
– Le trottoir ?
– Oui, bon, j’extrapole pour amuser la galerie, mais j’ai bien fait les cent pas sur un trottoir parce que je ne sais rien faire d’autre.
– T’es sérieux ? s’inquiète Françoise.
– Tout ce qu’il y a de plus sérieux, et René, si tu veux bien me servir un diabolo-orgeat…
– Diabolo-orgeat ? Mais c’est pour les enfants, ça !
Le regard de Maurice se tourne vers Françoise et dégringole sur son manteau rouge. Françoise :
– Oh putain, Diégo, retiens-le, il part, il part !
Effectivement, Maurice n'est pas au top, il est même plutôt mal, agrippé-crispé à la barre du zinc, tout le reste du corps ramollo dans les bras de Diégo.
– Merde, Maurice ! Maurice !
*
Mais Maurice va bien
*
Maurice va très bien
*
Maurice est proche, tout proche
*
D’une sortie, une sortie, bientôt, bientôt
*
Laissez le voile encore un peu, juste encore un peu
*
Je sais qu’elle va venir,
*
qu’elle va venir,
*
laissez-moi juste l’attendre, l’attendre,
*
l’attendre,
*
l’attendre,
*
la tendresse,
*
la tendresse,
*
l’attendre, est-ce trop demander ?
*
Fin
Dernière édition par Thierry Lazert le Jeu 9 Nov - 7:26, édité 1 fois
Thierry LazertMer 8 Nov - 21:21